Haïti Priorise: Renforcement du système rizicole, Lybbert
Présentation du problème
Le rapport entre la production nationale de riz et sa consommation a diminué de cinq fois depuis 1985. Les contraintes et les difficultés de production abondent et comprennent une faible infrastructure, un environnement dégradé, une situation précaire de la propriété foncière, un manque d’investissement, des marchés peu développés, ainsi que de fréquents accidents climatiques, des crises économiques et politiques. Si la production nationale de riz satisfaisait la consommation des habitants autrefois, maintenant elle ne fournit plus que 20% des besoins de la population.
Solution
- Améliorer et renforcer la production de riz
75% à 80% du riz haïtien est produit dans la vallée de l’Artibonite. La chaine de valeur du riz est faible à cause d’une productivité réduite résultant d’une infrastructure médiocre, d’un accès limité aux techniques et intrants agricoles, d’un drainage inapproprié, d’un mode de récolte inadéquat, de mauvais entrepôts, ainsi que de circuits commerciaux inefficaces et mal gérés.
Le projet a pour objectif de changer les pratiques agronomiques. La zone géographique d’intervention correspond en gros aux 28 000 hectares de rizières irriguées de l’Artibonite qui produisent près de 80% de la récolte totale du pays.
Le renforcement du système rizicole (RSR) aide les paysans à satisfaire leurs besoins en nourriture tout en diminuant la consommation d’eau et les frais d’achat de graines. Trois aspects particuliers du RSR le distinguent des pratiques plus traditionnelles en Haïti :
- Transplantation précoce des plantules de 8-12 jours de développement plutôt que de 21-30 jours comme dans la pratique traditionnelle.
- Plantation espacée des plantules isolées selon un maillage contrairement à la plantation irrégulière de bouquets de plantules plus âgées.
- Irrigation intermittente permettant aux rizières de sécher périodiquement.
Le RSR constitue une rupture avec les pratiques traditionnelles et contredit les connaissances conventionnelles des paysans transmises de génération en génération. Les modifications essentielles sont le remplacement des graines et de l’eau par la transplantation de plantules et le désherbage. Cette intervention comprend
- Des parcelles de démonstration du RSR. Une parcelle de démonstration par unité de production (~215 hectares).
- Un programme de formation au RSR. Une formation d’enseignants à cette technique pour qu’ils encouragent son expérimentation et son adoption, au moins de quelques principes.
- Un support technique au RSR. Le projet fournira des aides financières saisonnières aux formateurs et un complément de salaire pour les techniciens et les agents du Bureau agricole communal (BAC).
- Coordination et implantation par les associations d’irrigation locales. Les associations d’irrigation des unités de production fourniront les moyens institutionnels locaux pour coordonner et mettre en pratique le projet.
- Une aide à la diffusion du crédit agricole. Il existe une aide à l’accès au crédit mais qui est en déclin. Le projet permettra aux caisses de crédit locales de prêter directement aux fermiers en collaboration avec les associations d’irrigation.
- Curage et entretien des principaux canaux et drains d’irrigation. L’entretien des principaux canaux et drains nécessite un équipement lourd qui est de la responsabilité de l’ODVA, un service du ministère de l’agriculture. Durant les dernières années, cela semble avoir été réalisé seulement quand une aide extérieure destinée à cet effet se présentait.
- Des mesures d’incitation aux fournisseurs de motoculteurs. Les fermiers doivent pouvoir disposer de prestations de préparation des terrains qui soient suffisantes et opportunes. Beaucoup d’entre eux louent les services de fournisseurs de motoculteurs (tracteurs à deux roues), mais ceux-ci ne sont pas assez nombreux actuellement. L’aide pourrait prendre la forme de bons offerts aux fermiers par le biais des caisses de crédit ou bien de subventions directes aux fournisseurs de motoculteurs.
Tableau récapitulatif du RAC
Intervention | Avantages | Coûts | Avantage pour chaque gourde dépensée |
---|---|---|---|
SRI-A,pour l’amélioration de la production de riz dans l’Artibonite | 2,9 milliards de gourdes (43 millions de dollars) | 3,9 milliards de gourdes (57 millions de dollars) | 0.76 |
Avantages et coûts
Le RSR exige principalement de la main d’œuvre et donc celle-ci représente le coût essentiel du projet, suivie par les frais de préparation des rizières, les fertilisants, la récolte, le battage et le transport. Des coûts sont aussi prévus pour l’assistance directe des associations d’irrigation en termes de coordination et de formation. Le coût total avoisine les 3,9 milliards de gourdes, soit 57 millions de dollars.
Les experts avancent que l’ensemble des interventions permettraient un gain de production de 14%. En moyenne, cela signifie un bénéfice d’environ 23 000 gourdes (330$) par hectare et par an. Cela paraît positif. Toutefois, les coûts augmentent aussi. Il y a des frais privés plus élevés de main d’œuvre, de préparation des champs, de fertilisants et de transport ainsi que des coûts substantiels d’assistance technique. Par hectare, l’augmentation des frais atteint 30 000 gourdes (430$). C’est pourquoi les experts considèrent que le projet n’atteint pas le seuil de rentabilité en termes d’investissement financier : les gains pour Haïti sont moindres que les dépenses.
Cela pourrait paraître surprenant car le RSR possède de nombreux adeptes enthousiastes. Bien que la vue d’ensemble ne soit pas positive, le RSR pourrait avoir plus de sens pour certains fermiers qui disposeraient d’une main d’œuvre bon marché tout particulièrement. Il est aussi important de remarquer qu’une organisation différente des interventions pourrait être plus efficace.
Également, certains aspects du RSR pourraient avoir du sens s’ils étaient mis en pratique individuellement. Par exemple, l’assurance d’un entretien des canaux et des drains par l’ODVA aurait presque à coup sûr plus d’avantages que de coûts. De la même façon, la diffusion de l’accès aux crédits agricoles dans la vallée de l’Artibonite pourrait avoir un impact important.